Élements forts de composition
– Le littoral et ses plages
immenses couplées à des
milieux naturels de grande
richesse, protégées et
aménagées pour la découverte
– Deux agglomérations régionales de premier rang, toutes deux
marquées par l’urbanisme de la Reconstruction : l’agglomération dunkerquoise et l’agglomération calaisienne. La première ayant œuvré principalement à sa reconquête interne, la seconde gérant l’explosion de sa périphérie (Eurotunnel) et la reconquête interne en cours (ZPPAUP, musée de la dentelle, projet ANRU)
– Une cohabitation et une imbrication spatiale entre activités industrialo-portuaires, milieux naturels, espaces habités et lieux de fréquentation touristique qui « contraignent » chacun à l’excellence
– Une richesse patrimoniale très diversifiée, finalement peu mise en valeur dans sa globalité (très fort ancrage du patrimoine naturel) et dans son « assiette territoriale » à savoir le littoral de la mer du Nord, dans le département du Nord et dans celui du Pas-de-Calais.
Littoral dunaire
Soixante kilomètres de dunes ourlent la plaine des
wateringues de Sangatte à la frontière franco-belge et se
poursuivent longuement au-delà. Le littoral dunaire de la
mer du Nord, et singulièrement les immenses plages de
sable de ce littoral, sont un espace symbolique majeur
pour la Région Nord - Pas-de-Calais. L’immensité du
plat pays entre en résonance avec l’immensité marine,
infini horizontal, et l’immensité céleste, infini vertical. Tout
dans ces paysages est démesuré. Malgré la singularité
d’une frontière linguistique que le petit fleuve côtier ne
parvient guère à justifier (et pourtant, on parlait flamand
à l’est et picard à l’ouest), la vaste plaine du delta de l’Aa
est un ensemble homogène, ou l’unité de mesure est le
grain de sable. Malgré la frontière linguistique qui d’une
rive à l’Aa quitte le pays flamand pour le pays picard, le
système dunaire qui endigue la vaste plaine du delta de
l’Aa est un ensemble homogène ou l’unité de mesure
est le grain de sable. Le sable est partout, même pour
alléger la terre noire des maraîchers du Dunkerquois.
Le littoral de la mer du Nord est fait de sable, mais aussi
de dunes riches de végétation mais peu arborées, de
digues, de fossés de drainage, de fermes isolées et de
ports tels des échancrures dans les sables. Les dunes
de Bray-Dunes, Zuydcoote, Leffrinckouke, Oye, Calais
et Sangatte ne manquent pourtant pas de diversité : une
diversité essentiellement due aux voisinages entre milieux
naturels et espaces habités. Les images sont toujours
très fortes : le littoral belge depuis les plages de Bray-
Dunes, le sanatorium au milieu des sables à Zuydcoote,
les campings ou les constructions ou l’on mange du sable
avec le sourire, le phare de Walde comme une vigie sur
l’estran, la plage de Sangatte avec ses cabanes et en
toile de fond le relief du Blanc Nez… L’épaisseur de ce
cordon dunaire, si l’on enlève les plages elles-mêmes
et leurs estrans, est un espace assez modeste de deux
kilomètres au plus large (Dunes du Fort Vert à Calais
et du West-Hoek à Bray-Dunes). Très vite, à l’arrière,
commence le domaine de la plaine. Le Grand paysage
régional rattache cependant trois ou quatre kilomètres de
terre au-delà des dunes aux paysages littoraux. Dans cet
espace, les hommes se sont organisés en « résistance »,
accompagnant la ligne du rivage pour mieux l’affronter.
Les digues, les canaux, les routes, les voies de chemin de
fer longent la côte, reliant les trois ports principaux de ce
littoral : l’ensemble dunkerquois, Gravelines et Calais.
Découvrir les paysages du littoral dunaire appelle une
certaine constance et l’amour des lignes parallèles. Le
piéton préfèrera le sentier du littoral et sera bien inspiré
d’oser quelques divagations à l’intérieur des sables,
dans ces « petits déserts » fourmillant de vie. Le cycliste
se risquera sur un réseau de voies modestes situées
immédiatement derrière les dunes. l’Est de Dunkerque
ce sera l’occasion de découvrir les paysages de la ferme
Nord, de l’usine des Dunes, etc. l’Est de Calais, ce
sont les Hemmes de Marck, d’Oye, ces terres neuves
qui cultivent un goût de solitude devenu étonnant à si
peu de distance du littoral. L’automobiliste se résoudra à
emprunter la Nationale 1 et à tenter de lui porter un regard
neuf, dégagé de l’idée de destination, un regard d’historien
qui disposerait d’un matériel de fouille complètement
mélangé qu’il lui faudrait tenter d’ordonner. Car cette
route permet une appréciation très séquencée de l’histoire
urbaine du littoral de la mer du Nord. Et l’on peut risquer la
remise en ordre chronologique suivante : Oye ou Ghyvelde (le littoral rural), puis Gravelines ou Fort Nieulay (le littoral
fortifié), Dunkerque et Calais (le littoral reconstruit), le
Beau Marais à Calais ou Grande-Synthe (le littoral des
grands ensembles) et enfin le site d’Eurotunnel et du
centre commercial (le littoral contemporain). Mais, c’est
encore une fois le rail qui ose le parcours le plus diversifié :
longeant la rivière d’Oye, pénétrant la plaine pour desservir
Bourbourg, irriguant le complexe industrialo-portuaire,
et enfin pénétrant presque les dunes afin de rejoindre
Furnes en Belgique. Les moins curieux se contenteront
de l’autoroute A 16, ne découvrant la mer que lors de la
grande descente vers Calais.
Le port industriel
La mise en évidence d’une entité paysagère spécifique
pour l’ensemble industrialo-portuaire peu apparaître
comme une exagération. Pourtant le port s’étire sur une
quinzaine de kilomètres, de Dunkerque à la centrale
nucléaire de Gravelines, et représente donc un quart
du littoral de la mer du Nord. C’est la taille même de cet
ensemble, qui englobe de nombreuses villes et villages
(Fort-Mardyck, Mardyck, Grande-Synthe, Loon-Plage), qui
justifie la mise en évidence d’une entité paysagère. Le port
autonome de Dunkerque bénéficie par ailleurs d’une image
nationale, qui balance entre les drames de la Seconde
guerre mondiale et les hauts fourneaux de la sidérurgie.
Le port industriel à la particularité d’être très protéiforme,
s’étendant en de nombreuses directions, s’arrêtant pour
mieux reprendre, mêlant activités et sensation d’abandon,
entrepôts et usines, espaces ouverts et voies ferrées,
grosses entreprises internationales et petites entreprises
de sous-traitants locaux. Dunkerque comme souvent
dans les villes portuaires d’importance, le port est une ville
dans la ville, avec d’ailleurs son pouvoir propre au travers
du port autonome. La reconquête urbaine des espaces
portuaires du cœur de ville a commencé avec l’ensemble
des opérations du projet Neptune qui transforme
durablement l’image de la ville en la réconciliant avec son
site et son histoire.
La digue du Broek est un haut lieu de la découverte des
paysages du port industriel. Il est tout à fait marquant
de constater que ce sont les installations industrielles et
portuaires du XIXème et des trois premiers quarts du XXème
siècles qui composent le noyau dur de cette esthétique
portuaire fixée dans l’époque contemporaine par tant de
photographes. Les installations les plus modernes du
bassin de l’Atlantique et de la zone d’intérêt portuaire des
Huttes sont plus impénétrables et moins photogéniques !
Il est à ce titre significatif que le GR du littoral propose une
variante par la fameuse digue du Broek et délaisse les
installations portuaires de l’Ouest.