Un paysage Trans-régional
Il existe une grande
fraternité entre les
paysages de vastes
plateaux labourés de part
et d’autre de la limite
régionale séparant le
Nord - Pas-de-Calais de la
Picardie. Cette frontière
est pourtant très ancienne
puisqu’on en retrouve les
contours dans les limites
des provinces romaines
: au Nord, les Atrébates
(autour d’Arras) et les
Nerviens (autour de
Bavay) tandis qu’au Sud
ce sont les Ambiens
(autour d’Amiens). Mais
au-delà de l’histoire et
de ses conséquences
administratives, il ne
fait aucun doute, lors
d’un voyage Paris/Lille
sur l’autoroute A1, que
les Grands plateaux
artésiens et cambrésiens
appartiennent à la grande
famille des paysages
picards.
C’est le registre de la plaine cultivée qui se déploie sur
cette extrémité Nord du Bassin parisien. Ce Grand paysage
donne au département du Nord - Pas-de-Calais des cieux
immenses et une lumière franche qui, ne rencontrant aucun
obstacle sur son chemin, frappe de sa pureté les oeuvres
humaines édifiées ça et là pour en habiter l’immensité.
Car immensité il y a ! Ces plateaux rivalisent avec le ciel
qui y est si omniprésent que l’on finit par ne plus savoir qui
est le miroir de l’autre. S’il faut lui trouver des limites elles
seront donc terrestres, et somme toute assez progressives,
car l’immensité semble n’avoir jamais vraiment de fin… Sauf
peut-être au Nord ou cet infini du plateau vient se heurter
aux fourmillements humides de la vallée de l’Escaut, qui
bifurque vers l’Est en sortant de ce Grand paysage, et à
ceux de la Sensée et de la Scarpe.
Vers le Sud en revanche c’est l’infini qui se perpétue
vers la terre des cathédrales puis vers Paris, sans limites
autres qu’administratives, et avec peut-être une emprise
visuelle de la brique rouge qui se réduit au fur et à mesure
que l’on progresse vers le Sud plus calcaire. Sur son axe
Est-Ouest, le Grand paysage des plateaux artésiens et
cambrésiens vient mourir doucement dans la verdure.
Vers l’Est le Hainaut ménage une transition douce vers
le bocage avesnois, et vers l’Ouest c’est le Ternois, avec
son alternance de vallées, de villages bocagers et de
petits plateaux ondulés, qui fait prendre conscience, par
une sorte de miniaturisation progressive, du fait que l’on
est bien sorti de ces plaines infinies. Peu à peu les grands
plateaux y sont bientôt marqués d’entailles de plus en plus
rapprochées ou s’écoulent des vallées verdoyantes et
tranquilles qui font définitivement quitter le lieu du combat
grandiloquent que se livrent les forces horizontales…