Les paysages du Haut Artois sont l’occasion de distinguer
les approches analytiques des approches spatiales –in situ’,
les approches scientifiques des approches sensibles ! Du
point de vue des paysages tels que perçus, trois sous-
ensembles ont été distingués au sein du Haut Artois : les
Hauts plateaux au Nord, la Haute vallée de la Lys au Sud
et la Haute vallée de l’Aa entre les deux.
L’analyse de, l’occupation du sol dans ces trois secteurs révèle pourtant
une étonnante unicité :
les villages et les bourgs représentent entre 5 et 8% ;
l’industrie est insignifiante (0,5% au plus) ;
les cultures occupent entre 58 et 62% des sols ;
les prairies sont les plus constantes avec 26 à 27% ;
les bois enfin sont un peu moins présents au niveau
de la Haute vallée de la Lys (5%) que dans les deux
autres secteurs (7 à 8%).
Au-delà des rapports quantitatifs entre les usages du sol,
l’analyse de la carte d’occupation du sol ne permet pas
non plus d’isoler nettement les trois visages de ce Grand
paysage régional. L’ensemble des paysages du Haut Artois
semble construit sur un modèle d’alternance entre des
zones habitées, herbagères et des zones cultivées, sans
que le relief n’apparaisse comme le critère déterminant.
Pourtant, les Hautes vallées de la Lys et de l’Aa présentent
des continuités herbagères et villageoises que nulles autres
vallées n’égalent. Les espaces situés entre ces plateaux ne
se présentent pourtant pas comme des déserts céréaliers,
mais comme des lieux également habités ; chaque village
couplant comme ailleurs espaces artificialisés et prairies.
Seuls, les Hauts plateaux artésiens ne présentent pas le
même profil. La vallée du Bléquin et ses proches voisines
dévalent vers l’Aa en à peine dix kilomètres, tandis qu’au
Sud/Ouest les villages de Bourthes, Bécourt, Zoteux ou
encore Campagne-les-Boulonnais occupent un plateau
faiblement entaillé. Ces villages perchés apparaissent,
avec leurs auréoles bocagères, comme de petites oasis
verdoyantes.
Ainsi, malgré l’évidente impartialité de l’analyse,
l’occupation des sols ne peut à seule permettre d’approcher
la diversité paysagère d’un territoire. Ne faut-il pas se
rendre sur place pour saisir la complexité du site paysager
de Lumbres, adossant sa ville et ses activités économiques
au somptueux coteau de l’Aa ? Et ne faut-il pas sillonner
successivement la Haute vallée de la Lys et celle de l’Aa
pour lentement en saisir les nuances, l’une plus ouverte,
mais aussi indécise et l’autre plus étroite, tranchée dans
le calcaire ? Ainsi, des rapports équivalents quant aux
usages du sol ne signifient pas des paysages identiques.
Au contraire, il s’opère d’infinies adaptations aux lieux, à
l’histoire, aux besoins, qui sculptent des paysages parents,
mais différents.