« Cette folie constructive »
laisse derrière elle
une production bâtie
particulièrement riche ! Ce
mouvement architectural
et urbanistique assez
mal connu (et reconnu
…) n’en reste pas moins
remarquable à plus d’un
titre : ampleur des projets
(et des réalisations),
évolution des typologies de
logements, production de
63 000 maisons ouvrières
dans le bassin du Pas-de-
Calais en 1931…
l’échelle de la région et vu du ciel, le bassin minier
« semble n’être que paysages de ville ». La réalité du
terrain reste évidemment beaucoup plus complexe !
Certes la densité urbaine est ici plus élevée qu’ailleurs ;
certes les infrastructures routières et ferroviaires semblent
partitionner le territoire en sous-espaces isolés les uns des
autres ; certes l’organisation même du développement
urbain échappe complètement à la pure logique urbaine
pour répondre à la logique de puits … Pourtant l’eau est
omniprésente, les boisements parfois de bonne taille,
l’agriculture occupe tous ces interstices, chaque terril a sa
propre identité et sa propre valeur environnementale.
En termes de paysage urbain, l’histoire nous lègue
quatre centres anciens fortifiés (Béthune, Lens, Douai
et Valenciennes) possédant chacun leurs spécificités,
mais aussi leurs similitudes comme la présence de l’eau,
l’existence d’un patrimoine public et également privé
(datant notamment du XVIIIème siècle) …en cours de
valorisation.
Sur ces coeurs anciens se greffent, comme dans toutes les
villes centres :
– des faubourgs du XIXème siècle, mixant habitat et
activités, initialement organisés autour de l’arrivée du
chemin de fer,
– des quartiers issus de la reconstruction pour certains
d’entre eux,
– des formes urbaines plus récentes comme les immeubles
collectifs des trente glorieuses, les lotissements
pavillonnaires des années 1980-1990 et leur lot de centres
commerciaux plus ou moins vastes …
Pourtant ici, à ce schéma « presque banal », s’ajoute
l’explosion minière de la fin du XIXème et du début du
XXème siècle. « Cette folie constructive » concerne assez
peu les villes centres anciennes, déjà très largement
constituées, mais plutôt les villes périphériques comme
Liévin, Avion, Sallaumines, Noyelles … pour Lens ou Anzin,
Saint-Saulve, Beuvrages … pour Valenciennes, formant au
final de véritables agglomérations continues sur plus de 10
kilomètres de long notamment pour l’ensemble allant de
Bully-Les-Mines à Noyelles-Godault.
Ce phénomène ne se limite pas aux grandes villes et
s’applique indifféremment sur tout le territoire du bassin
minier. Répondant à une logique d’exploitation et de
proximité, « les cités » se juxtaposent aux villages agricoles
existants ou s’implantent au beau milieu de la plaine ou de
la vallée agricole.
Les autres patrimoines !
L’exploitation minière
n’a pas fait table rase
des villes et villages
préexistant au sein du
bassin. Ce territoire recèle
également des monuments
anciens, des maisons en
rang du XVIIIème siècle,
des maisons de ville et
de maître du XIXème et
un patrimoine agricole
témoignant de la vocation
première des lieux …
Puits, terrils, bâtiments d’exploitation, infrastructures
induites, cités (suivis d’un numéro ou d’un nom inspiré
par le lieu, la forme urbaine ou la population résidente)
transforment des paysages agricoles en « micro satellite
urbain ». Des hameaux deviennent des villages industriels,
des villages évoluent en villes, d’autres sont quasiment
créés de toutes pièces comme Marles-Les-Mines ou Bruay-
La-Buissière …
L’exploitation du charbon s’accompagne, à partir de la
reconstruction, d’autres activités industrielles lourdes
comme la métallurgie et la sidérurgie, générant d’autres
paysages urbains sans échelles (humaines) et totalement
autarciques. Cette explosion urbaine, communément
appelée « magma urbain », n’a tout compte fait, jamais
cessé sa reconversion, il est vrai plus lourde depuis
25 ans …
Les paysages urbains d’aujourd’hui nous laissent certes
des friches très lourdes à reconvertir, des sections
d’infrastructures totalement obsolètes, des quartiers (corons
ou barres collectives) en grandes difficultés sociales …
Pourtant, … les villages gardent un cœur de village dans
lequel la ferme côtoie la maison basse et la maison de
ville…
… la production urbaine minière laisse quelques corons,
mais surtout un nombre conséquent de cités (jardins) de
grande qualité urbaine et pour certaines, architecturale…
… la production architecturale, notamment des
chevalements, des bâtiments de production et de gestion,
des cheminées, des bâtiments publics comme les écoles,
les lieux associatifs, lègue un patrimoine considérable…
… les terrils eux-mêmes amorcent aujourd’hui une
reconversion et une forme de reconnaissance de plus en
plus unanime …
… au Nord, le rapport à l’eau quasi permanent, rythmé
par les légères ondulations de la plaine de l’Escaut, de
la Scarpe et la Lys, génère un rapport plus étroit entre
l’urbanisation souvent linéaire, les secteurs humides et les
petits boisements résiduels…
… au Sud, le rapport à la plaine agricole quasiment plane,
ouvre des visions plus lointaines sur ces villes, villages,
infrastructures linéaires plantées et des boisements, plus
conséquents notamment vers l’Ouest.
Aujourd’hui, le misérabilisme ambiant des années 1980
laisse place à de l’espoir et de la fierté salutaires pour les
hommes et les femmes de ce territoire.