Voici des paysages qui semblent doucement et
imperturbablement regarder passer les saisons. Avec le
passage de l’autoroute A 26 dans l’échancrure de relief
qui laisse également passer la Hem et avec le passage
du TGV le long des boisements des Coteaux calaisiens,
le pays semble avoir connu ses bouleversements les plus
lourds et les plus brutaux. Ces transformations semblent
assumées avec une certaine tranquillité, ainsi qu’une
étonnante propension à la « résilience ». Des bois poussent
lentement aux abords de la voie ferrée, recousant ici et là
les entailles provoquées par le tracé horizontal et le grand
rayon de courbure qu’impose la ligne à grande vitesse.
Quant au débouché de la vallée de la Hem, il n’a guère
été plus préservé que celui de sa voisine l’Aa. Il révèle des
paysages certes décousus, largement traversés par des
infrastructures, qui semblent annoncer que la rivière va
bientôt se perdre et se dissoudre dans la plaine. La vallée
paraît devancer cette perte d’identité comme pour moins
la subir, générant un paysage « carrefour », possédant une
valeur intrinsèque.
Que penser de la sérénité première qui se dégage du
Grand paysage régional ; serait-il épargné par les diverses
pressions à l’oeuvre, au moins dans leurs manifestations
les plus radicales ? Comme c’est souvent le cas dans cette
hypothèse, des évolutions par petites touches peuvent
bouleverser durablement des lieux par ailleurs inchangés
sans que l’on ait vraiment le temps de s’en apercevoir.
l’Ouest comme au Nord, les pressions urbaines s’exercent
à la fois pour des usages résidentiels et touristiques.
Constructions nouvelles le plus souvent en périphérie
des villages, transformation de fermes en résidences,
et à mesure que l’on se rapproche du littoral, maisons
secondaires vides la moitié de l’année…
Au coeur du Pays de Licques, les paysages semblent
plus figés et moins vulnérables encore. Pourtant quelques
constructions neuves offrent des façades flambant neuves
à la sorties des bourgs ou des villages, le long de voies
irriguant les campagnes. L’habitat ancien, vaste et
malcommode, réussit mal sa reconversion et cède ainsi
la place à des maisons nouvelles dans leur forme comme
dans leur implantation, vecteurs d’un certain besoin de
reconnaissance.
Ces paysages ont connu quelques opérations de
boisement en lien avec les créations d’infrastructures. Leur
développement peut être posé dans des espaces ou ils
sont déjà présents et ou l’avenir incertain de la politique
agricole commune pourrait conduire à des positions
d’attente, voire de repli de l’agriculture. Longtemps,
les boisements sont apparus comme un objectif tant
économique que cynégétique. Il est clair aujourd’hui, que
ce sont les paysages ruraux hérités des siècles passés qui
offrent le cadre de vie essentiel de la diversité biologique de
notre pays. Le boisement ne peut ainsi apparaître comme
une panacée. Il peut cependant prendre une juste place en
accompagnement et renforcement de logiques forestières
existantes.
