Comme pour attester de
sa dimension « fermée »,
l’Avesnois n’a jamais
été un paysage trans-
frontalier. La frontière,
et ce depuis les romains
jusqu’aux blockhaus
de la seconde guerre
mondiale, a toujours été
une frontière protégée,
étanche, offrant peu de
voies de communication.
Ainsi, cette frontière
créée par la forêt
orientée du Nord au
Sud, se double d’une
frontière paysagère,
puisqu’elle jouxte autant
qu’elle préfigure la
montagne ardennaise
située essentiellement en
Belgique. En revanche au
Sud, en terres picardes,
le bocage poursuit
sa course quelques
kilomètres avant que
les riches terres des
cathédrales ne prennent
le pas.
Assurément, en entrant dans les paysages avesnois, tout
observateur perçoit qu’il quitte un système pour en aborder
un autre. Très franche au niveau du Bois l’Évêque, la
transition est pourtant plus délicate au Nord et à l’Ouest du
Grand Paysage Régional. Les grandes plaines céréalières,
les grandes conurbations sont étrangères au paysage
avesnois ; c’est en réalité davantage à la campagne
anglaise ou à la Normandie qu’au Nord - Pas-de-Calais que
ce dernier semble emprunter cette structure bocagère si
« radicale ». De la même manière que le marais audomarois,
mais sur un territoire beaucoup plus étendu, l’Avesnois
reste rebelle aux images d’Épinal des paysages nordiques.
Herbager, rural, isolé, immuable… voici l’esquisse de ce
Grand paysage de l’extrémité Sud de la Région. Mais si les
bocages donnent l’étonnante impression de la longévité,
celui qui couvre les collines entre les deux Helpes n’a peut-
être pas 300 ans !
Paradoxalement, le bocage fut sans doute au XIXème
siècle une forme d’intensification de l’agriculture grâce
à une production laitière et de viande au service des
agglomérations industrielles. Son maintien aujourd’hui,
alors que le bocage flamand a totalement disparu, signe
cependant l’âpreté de ces sols froids. Comprenant
également les plus grands massifs forestiers de la région,
le Grand paysage avesnois est par excellence un paysage
fermé, sans cesse borné par des formes paysagères
très typées : haies taillées à hauteur d’homme, arbres
d’alignement, chemins sinueux bientôt transformés en
routes étroites formant labyrinthe. L’horizon se dérobe sans
cesse derrière une haie, un virage, et puis finalement une
lisière… Un « paysage sériel » en somme, qui se répète selon
des modalités mille fois recommencées ou le promeneur a
l’impression de progresser au sein d’un labyrinthe…