Auxi-le-château
300 000 ans d’histoire
expliquent sans doute
que tant de regards se
déplacent vers la modeste
bourgade d’Auxi-le-
Château. Des livres
décrivent les histoires
du lieu, que des guides
reprennent à voix haute
lors des très nombreuses
promenades qui sont
organisées dans la ville et à
sa périphérie.
La recherche d’œuvres d’art ayant eu l’Authie pour objet
ramène ce territoire à son statut de « bout du monde ». Le
caractère frontalier du fleuve explique peut-être la rareté
des images ou de leur diffusion à l’échelle régionale. Mais,
comme dans d’autres Grands paysages régionaux arrière-
littoraux, il convient de constater ici encore l’impact de la
mer comme lieu de focalisation des regards. Le littoral des
dunes et estuaires d’Opale comme la Baie de Somme ne
manquent pas de représentations ; précurseurs y compris
en matière de pratiques sociales, les artistes ont été, tôt
dans le XIXème siècle, se confronter aux immensités
marines. Est-ce suffisant pour expliquer la difficulté à
rassembler des images représentant les paysages de la
vallée ?
Il y aurait sans doute beaucoup à trouver dans les collections
familiales des nombreux châteaux qui émaillent le territoire.
Et, il y a - de l’autre côté de la frontière régionale ! - l’abbaye
de Valloires et ses jardins dessinés par le paysagiste
français Gilles Clément, qui donnent à la vallée une aura
nationale. Mais pour autant, l’Authie semble aujourd’hui
devoir garder ses secrets.
Une exception vient confirmer la règle : la ville et le site
d’Auxi-le-Château. L’ensemble apparaît un peu comme le
porte-drapeau de la vallée tout entière, une sorte de ville-
phare. C’est ce que suggère merveilleusement la peinture
de Charles Mouillez page précédente, peintre du XIXème
siècle, exposée au musée des Arts et traditions populaires
d’Auxi-le-Château. Le caractère à la fois bucolique et très
structuré du paysage du val d’Authie ressort de cette
oeuvre qui montre un village ramassé, entouré d’arbres
dont la présence semble avoir été pensée pour le mettre en
valeur. L’oeuvre a ceci d’intéressant qu’une comparaison
avec le même paysage actuel révélerait sans doute à
quel point l’omniprésence des plantations de peupliers au
fond de vallée compromet les perspectives. Cette peinture
propose une vue « en coupe » de la vallée et s’attache à
décrire la variété des ambiances paysagères. Ainsi, le
relief est parfaitement lisible d’un versant à l’autre, ce
qui permet d’entrevoir la relation avec le bord de plateau
cultivé à droite. Des bois denses occupent déjà les ruptures
de pente entre les hauteurs des plateaux et les coteaux,
soulignant d’ombre le cadre strict de la vallée. Les coteaux
semblent plutôt ouverts, mais ils plongent rapidement dans
le fond plat de vallée. Des prairies en fleurs offrent alors des
espaces de promenade et de cueillette, tandis qu’au loin se
dresse le clocher de l’église.