Enquête publique : un outil au service de la gouvernance

L’enquête publique est une procédure de consultation du public, préalable à la prise de certaines décisions administratives concernant des opérations (ce mot étant pris dans son sens le plus large) d’aménagement ou de planification, des servitudes,….et susceptibles de porter atteinte, entre autres, à des libertés, des droits fondamentaux (à titre d’exemple, le droit de propriété, le droit d’usage) ou des enjeux d’intérêt général comme celui de l’environnement (la Charte de l’environnement adoptée par le Parlement le 28 février 2005 a été adossée à la Constitution)..

Au départ réservée pour des domaines ciblés (exemple : atteinte au droit de propriété), l’enquête publique a donc été progressivement étendue à de nombreux autres champs d’activités. C’est donc une procédure qui, avant autorisation/approbation d’un projet de travaux/ aménagements/ouvrages ou validation d’un programme ou d’un schéma, informe le public et lui permet de mieux comprendre son opportunité, les enjeux en présence, les intérêts soulevés, les choix effectués et les impacts qui en découlent, sa bonne insertion dans le cadre de vie local et dans l’environnement.

L’enquête publique est une procédure conduite le plus souvent par l’administration de l’Etat ; mais des Collectivités locales peuvent en conduire certaines : les Communes par exemple pour les enquêtes publiques des plans locaux d’urbanisme.

Dans l’enquête publique, le public est invité à préciser au maître d’ouvrage de l’opération et à l’autorité organisatrice de l’enquête publique -qui peuvent être une seule et même personne- ses appréciations, ses suggestions et ses contre propositions, soit en les consignant sur le registre d’enquête, soit par écrit en les adressant à un Commissaire Enquêteur dont la présence pendant l’enquête est prévue par la plupart des textes. L’enquête publique est un processus prévu par la loi, spécifié le plus souvent par Décret et/ou par des Codes (accessibles par le site internet de Légifrance), qui s’insère dans un processus de décision. L’omission de cette procédure conduit le juge à annuler la décision administrative d’approbation ou d’autorisation de l’opération envisagée.

L’enquête publique a une assise territoriale variable mais géographiquement limitée ; la consultation se déroule dans une ou plusieurs communes parfois un très grand nombre (exemple de certaines enquêtes pour installations classées ou pour la Loi sur l’eau). L’enquête publique a une durée qui varie de 15 jours à 1 mois et 2 mois pour les enquêtes publiques définies au Code de l’Environnement (les gros projets ou ceux qui présentent des enjeux forts, sur l’environnement entre autres).

Outre l’information du public, l’enquête publique présente 2 autres intérêts fondamentaux :
1. inciter le maître d’ouvrage de l’opération à mieux élaborer son projet et rendre les impacts négatifs acceptables (au regard de la réglementation mais aussi socialement).
2. éclairer l’autorité qui décide (l’État, les Collectivités…) chargée de prendre (dans certains cas) la décision d’autorisation ou d’approbation de l’opération envisagée.
L’autorité qui désigne le commissaire enquêteur est fonction du type d’enquête :

  • Président du Tribunal Administratif pour les enquêtes du Code de l’environnement et les enquêtes d’expropriation
  • Préfet de Département pour les enquêtes de droit commun
  • Maire pour certaines enquêtes locales spécifiques

Le commissaire enquêteur qui conduit l’enquête a un rôle essentiel ; son statut s’apparente à celui d’un collaborateur occasionnel de l’administration. Depuis la réforme introduite par la loi Barnier et son Décret d’application (20 juillet 1998), des listes d’aptitude sont établies au niveau départemental (entrée en vigueur le 1er janvier 1999). Le commissaire enquêteur est obligatoirement désigné parmi ces listes.

Les évolutions historiques de l’Enquête Publique

L’enquête publique n’est pas une procédure nouvelle puisque les premiers textes (expropriation ; commodo incomodo) sont apparus au 19ieme siècle ; les évolutions successives (forme et fond) au 19ieme et 20ieme siècle ont épousé les préoccupations sociales. Les évolutions les plus récentes doivent maintenant intégrer également les enjeux des Directives Européennes. Parmi les réformes, celle initiée par la Loi relative à la démocratisation des enquêtes publiques et à la protection de l’environnement du 12 juillet 1983 (dite loi Bouchardeau) est fondamentale. Cette réforme apporte de nombreuses modifications aux dispositions et pratiques antérieures :

  • dépassement du seul droit de l’expropriation ; exemple : le droit environnemental ; le droit à l’information du public (notamment des Associations).
  • élargissement du champ d’application ; certaines opérations sont désormais soumises à une enquête alors qu’elles en étaient exemptes
  • modification du mode de désignation du commissaire enquêteur (désignation par le Tribunal Administratif à partir des listes départementales).
  • élargissement des pouvoirs du commissaire enquêteur (visite des lieux, réunion publique, prolongation de l’enquête,…..).
    Le champ d’application, l’objet, la procédure de déroulement de ces enquêtes publiques sont définies au Code de l’Environnement et elles sont essentielles car concernant des opérations importantes ou à forts enjeux. Les autres enquêtes publiques -dites de droit commun- peuvent s’inspirer de leurs principes.

Modernisation des procédures

Tout en restant dans le cadre légal et réglementaire, ces dernières années des initiatives sont apparues afin de moderniser les enquêtes sur certains points. L’usage du traditionnel registre des observations paginé reste maintenu, mais les modalités d’information du public peuvent être étendues à l’usage des nouvelles technologies et cette extension est favorisée. Par exemple, la mise à disposition du dossier d’enquête publique par le Maître d’Ouvrage sur un site Internet est encouragée. Le recueil d’une partie des observations du public via Internet pourrait être envisagée. Toutefois cette disposition n’est pas à ce jour « consolidée juridiquement ».

Le rôle des Élus dans la procédure d’enquête publique

Les exécutifs des collectivités peuvent être l’autorité organisatrice pour certaines procédures, et par exemple :

  • la voirie communale (sauf en cas d’expropriation),
  • les constructions soumises à permis de construire sauf lorsque le permis de construire est délivré au nom de l’État,
  • l’aménagement de terrains de camping, de caravanage et d’habitat léger de loisir sauf lorsque les autorisations sont délivrées au nom de l’État,
  • les plan locaux d’urbanisme (PLU) : élaboration, révision, modification.

Dans d’autres cas, ils peuvent devenir relais de l’autorité organisatrice sur le terrain :

  • en affichant les avis d’enquête publique dans la commune,
  • en mettant à la disposition des commissaires enquêteurs un local et le dossier d’enquête dans les conditions fixées par l’Arrêté d’Enquête,
  • en organisant la clôture et la signature des dossiers d’Enquête déposés dans les mairies,
  • en tenant pendant une durée d’un an à la disposition du public à compter de la clôture de l’enquête le rapport et les conclusions du commissaire enquêteur.

Les maires et les conseils municipaux participent à la consultation du public :

  • un exemplaire du dossier soumis à enquête leur est adressé chaque fois que leur commune n’a pas été désignée comme lieu d’E.P. alors que l’opération doit y être exécutée ou est concernée par le périmètre d’enquête,
  • ils peuvent donner dans certains cas leur avis sur le projet.

1) La mission de commissaire enquêteur dans la conduite des enquêtes publiques

Ce qui suit s’applique aux enquêtes publiques réalisées au titre du code de l’environnement. Pour les enquêtes publiques dites de droit commun, (qui s’inspirent le plus souvent du Code de l’expropriation) le cadre d’exercice de la mission du commissaire enquêteur est défini par les textes spécifiques (décrets le plus souvent). Les enjeux des projets soumis à enquête publiques sont nombreux et variés : enjeux techniques, socio-économiques, politiques, environnementaux. Pour le type d’enquête visé ici, ces enjeux étant le plus souvent complexes, la présence de compétences variées est un des principaux intérêts des listes départementales d’aptitude. Dans le cadre de ce type d’enquête, le commissaire enquêteur dispose d’un large pouvoir de direction dans l’exercice de sa mission.

2) Les obligations du Commissaire Enquêteur

1. s’assurer, dès sa désignation par le tribunal administratif, qu’il n’y a pas incompatibilité pour cette mission (il s’agit des personnes qui pourraient avoir un intérêt personnel à l’opération)
2. prendre connaissance du dossier d’enquête
3. établir avec l’autorité organisatrice les modalités de l’enquête publique (durée et dates de l’enquête, lieux choisis pour la mise à disposition du registre, dates des permanences, publicité, jours et heures où le public pourra accéder au dossier)
4. recevoir les personnes qui désirent être entendues et veiller à l’instauration d’un dialogue
5. annexer au registre d’enquête le courrier adressé au siège de l’E.P.
6. coter et parapher le ou les registres d’Enquête
7. rédiger son rapport avec son avis motivé
8. accomplir les formalités de fin d’Enquête dans les délais réglementaires notamment la remise de son rapport à l’autorité organisatrice.

3) Les pouvoirs (sous conditions) du Commissaire Enquêteur

Le commissaire enquêteur dispose d’un certain nombre de pouvoirs effectifs ou de proposition pour diriger et animer l’enquête ; il s’agit :
1. de la visite des lieux (sous réserve de l’accord des propriétaires et occupants),
2. faire compléter le dossier d’enquête pour parfaire l’information du public,
3. provoquer l’organisation d’une réunion publique,
4. prolonger la durée de l’E.P. d’une durée maximale de 15j,
5. demander au tribunal administratif. de désigner un expert (pour résoudre un problème précis du dossier)

4) Déontologie, rémunération du Commissaire Enquêteur

Les éléments relatifs à la déontologie des commissaires enquêteurs sont essentiels. Une charte de déontologie a été élaborée par leur Association. Les commissaires enquêteurs sont indirectement rémunérés par les maîtres d’ouvrages des opérations selon un dispositif encadré de vacations. Toutefois tout lien direct de rémunération avec ce dernier est proscrit car les crédits transitent par un fonds spécial géré par la Caisse des Dépôts et Consignations.

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